Le labyrinthe
Caroline est perdue.
Pas dans un lieu, mais dans un labyrinthe intérieur.
Un dédale où chaque couloir se referme sur elle,
où chaque tournant la ramène à ce qu’elle fuit.
Rien n’a de sens ici.
Pas les voix qui murmurent au loin,
pas les souvenirs qui dansent en écho,
pas même ce goût de sang dans sa bouche.
Ce goût métallique, amer,
comme si sa propre douleur voulait s’imposer à elle,
lui rappeler qu’elle est encore en vie.
Mais est-ce vivre, quand chaque pas est une chute,
quand chaque pensée est un piège ?
6 octobre 2024, 06h12
Le matin s’installe, mais il est glacial. Pas à cause de la température de la pièce, mais parce que Caroline ressent ce froid à l’intérieur d’elle-même, dans un espace qu’elle ne sait nommer. Elle inspire profondément, mais l’air semble trop lourd, chargé d’une odeur de métal et de solitude.
Son corps est là, mais elle le ressent comme un objet étranger, une enveloppe qu’elle habite mal. Ses bras sont fatigués, comme si des poids invisibles y étaient suspendus. Elle essaie de lever les yeux, mais son regard reste fixé sur ses mains. Ces mains qui tremblent légèrement, comme pour lui rappeler qu’elle est encore vivante.
Caroline ne le sait pas
Caroline ne sait pas.
Elle avance, mais chaque pas semble la mener plus loin dans une condamnation qu’elle n’a jamais choisie.
Elle ne comprend pas encore,
mais cette condamnation est une apogée,
le point culminant d’un chaos orchestré par des forces
qu’elle ne maîtrise pas,
qu’elle ne voit même pas.
C’est comme si sept océans s’étaient donné rendez-vous.
Des vagues colossales, venues de mondes différents,
se croisant en une seconde d’éternité,
brisant le fragile équilibre du temps.
Ces océans ne s’écoulent plus dans une logique linéaire.
Leurs courants s’empilent,
s’entrelacent,
s’intègrent et se complètent,
créant une symphonie de chaos où rien ne peut subsister.
6 octobre 2024, 22h14
La nuit revient avec son silence oppressant, mais aussi avec des images qu’elle ne parvient pas à chasser. Elle imagine de nouveau un torse, large et apaisant. Ce n’est pas une envie charnelle, mais une quête essentielle, presque viscérale. Elle voudrait poser sa tête lourde et bruyante sur cette chaleur imaginaire, sentir un souffle qui lui dirait : “Tu n’es pas seule.”
Mais la réalité est là, dure et froide. Elle entend une toux sèche au loin, le bruit d’une porte qui grince. Rien ici ne ressemble à ce qu’elle imagine. Et pourtant, elle s’accroche à cette vision, comme une lueur fragile dans une nuit interminable.
Le chaos contre l’ordre
Dans ce tumulte, l’ordre n’a aucune chance.
Les lois qu’elle pensait immuables,
celles du temps, de la raison, de la vie même,
s’effacent sous la force brute de ce cataclysme intérieur.
Caroline est au centre de cette collision.
Elle est la mer et l’éclair,
l’œil du cyclone et la proie de ses vents.
Elle sent chaque élément s’écraser contre elle,
non pour la détruire,
mais pour la remodeler,
comme si elle devait renaître de ce chaos.
Et pourtant, elle reste figée,
incapable de saisir le sens de ce qui se passe.
comment comprendre une logique
qui a abandonné toute linéarité ?
7 octobre 2024, 10h47
Le jour est terne. La lumière du matin n’a rien de chaleureux, et pourtant elle éclaire brutalement les fissures de son âme. Caroline marche dans le couloir, ses pieds glissant presque imperceptiblement sur le sol lisse. À chaque pas, une pensée surgit : “Pourquoi moi ? Pourquoi ici ? Pourquoi maintenant ?”
Elle croise le regard d’un autre patient, mais ce regard ne reste pas. Il fuit, comme si ses propres démons ne lui permettaient pas de voir ceux des autres. Caroline baisse les yeux, piégée dans une pudeur qu’elle ne comprend pas. Elle aimerait tendre la main, mais elle n’ose pas. Elle se sent invisible, et pourtant terriblement exposée.
Un instant hors du temps
Caroline sent que cet instant est différent.
Le temps s’est retiré.
a quitté son rôle d’arbitre.
Ici, dans ce moment suspendu,
il n’y a plus de cause ni de conséquence.
Plus de début ni de fin.
Juste un présent infini,
un éclat de chaos où tout s’effondre
et où tout se reforme.
Elle est à la fois perdue
et intensément vivante.
Dans ce chaos, elle perçoit quelque chose d’autre :
non pas une logique,
mais une harmonie imprévisible,
une force brute qui l’écrase autant qu’elle l’élève.
8 octobre 2024, 04h30
Une douleur la réveille. C’est une douleur sourde, tapie dans sa poitrine, mais aussi dans ses muscles et ses os. Elle touche son visage, un geste réflexe pour s’assurer qu’elle est encore là, encore réelle. Mais ce geste lui rappelle aussi ce qu’elle ne ressent plus : le goût, l’odeur, la chaleur.
Caroline fixe le plafond, puis ses pensées dérivent vers l’image d’un vaisseau maudit. Elle s’imagine à bord, seule, perdue sur un océan noir, sans vent ni courant. Ce vaisseau est rongé, ses voiles déchirées. Mais il flotte encore. Et c’est peut-être là sa seule consolation : elle flotte encore.
Caroline et la renaissance dans le chaos
Caroline ne le sait pas encore,
mais le chaos qui l’entoure n’est pas seulement destruction.
Dans cet instant où sept océans se croisent,
où le temps s’efface pour laisser place à un tumulte éternel,
quelque chose d’autre commence à émerger.
Les vagues ne l’épargnent pas.
Elles la bousculent, l’éclaboussent, la brisent.
Chaque déferlante arrache une partie d’elle-même,
une douleur, un doute,
mais aussi un fragment de ce qu’elle croyait avoir perdu :
un souvenir, un rêve, une lueur d’espoir enfoui.
Elle est à la fois victime et témoin.
Caroline sent le chaos agir sur elle,
non comme un ennemi,
mais comme une force brutale et nécessaire.
C’est une reconstruction violente,
sans douceur,
sans promesse de soulagement.
9 octobre 2024, 18h20
Le soir s’installe doucement. Caroline regarde les ombres s’allonger sur les murs. Ces ombres dansent légèrement, mouvantes, insaisissables, et elles lui rappellent quelque chose d’elle-même. Elle aussi est insaisissable, même pour son propre esprit.
Elle pense à l’abîme qu’elle porte en elle. Ce vide immense qui aspire tout, mais qui, étrangement, n’est pas qu’une menace. Ce soir, elle se demande si cet abîme pourrait être un point de départ, une toile blanche sur laquelle elle pourrait redessiner sa vie. Mais pour cela, il faudrait qu’elle ose plonger.
Le retour à la matière
Caroline sent les forces s’apaiser.
Le chaos ne disparaît pas,
mais il change de rythme.
Les courants ne s’opposent plus,
ils dansent.
Les vagues cessent de détruire,
elles sculptent.
Elle ferme les yeux,
non pour échapper au tumulte,
mais pour mieux l’accueillir.
Elle se laisse submerger,
son corps et son esprit deviennent une matière malléable,
remodelée par des mains invisibles.
Le froid glacial de l’abîme fait place à une chaleur étrange,
une chaleur qui ne vient pas de l’extérieur,
mais qui semble naître au creux d’elle-même.
10 octobre 2024, 14h35
Une colère monte en elle, lente mais brûlante. Ce n’est pas une explosion soudaine, mais une chaleur sourde qui se répand dans sa poitrine. Elle se reproche cette fatigue, cette incapacité à se lever complètement, à se détacher de ce chaos intérieur. Elle voudrait crier, mais sa voix reste enfermée, comme si elle n’avait plus le droit d’exister pleinement.
Elle se lève et marche jusqu’à la fenêtre. Le monde extérieur semble si loin, si inaccessible. Elle ferme les yeux et fait un vœu : “Que quelqu’un me voie. Que quelqu’un me tende la main.” Mais ce vœu reste suspendu, comme une prière sans écho.
L’abîme devient un berceau
Ce qui était un précipice, un vide,
devient un berceau.
Caroline comprend que l’abîme n’est pas son ennemi.
Il est le lieu où tout commence,
le point zéro d’où naît une nouvelle version d’elle-même.
Elle n’a pas à fuir ce chaos.
Elle doit y plonger,
s’abandonner à son courant,
car c’est en se laissant détruire qu’elle pourra se reconstruire.
Les fragments de son être,
dispersés par la tempête,
se rassemblent peu à peu.
Ils ne forment pas une copie de ce qu’elle était.
Ils créent quelque chose de neuf,
quelque chose de plus fort,
de plus authentique.
Un corps qui respire à nouveau
Caroline sent son souffle revenir.
Il est irrégulier, fragile,
mais il est là.
Chaque inspiration est une victoire,
un pas vers cette nouvelle version d’elle-même.
Elle touche son propre visage,
comme si elle devait s’assurer qu’il est bien réel.
Ses mains, autrefois tremblantes,
ont retrouvé une force inattendue.
Ce chaos qu’elle redoutait
n’était pas une fin.
C’était une mue.
Une lumière intérieure
Elle ouvre les yeux,
et pour la première fois,
elle n’a plus peur de ce qu’elle voit.
Le labyrinthe n’a pas disparu,
mais il a changé.
Ses murs ne sont plus des prisons,
ils sont des chemins.
Caroline comprend que le chaos ne cherche pas à détruire.
Il cherche à créer,
à redéfinir,
à libérer.
Et dans ce chaos,
elle trouve enfin cette lumière vacillante,
non plus comme un lointain espoir,
mais comme une flamme qui brûle en elle.
Elle se relève.
Elle ne sait pas encore où elle va,
mais cette fois,
elle n’a plus peur.
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